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Biographie de Cheb Tati
Passé à la moulinette du marketing ambiant, mis sous serre technologique et banalisé par un costume passe-muraille, le raï, en version canal Majors, a beaucoup perdu de son feeling initial et de sa virulence première. Sans cultiver le passéisme, ni regretter les lourdes nappes de synthé de naguère, quelques artistes, issus du canal Historique, refusent encore et toujours de chausser les pantoufles de l'internationale raï standardisée. Pour autant, ils ne rejettent pas de nouveaux habits musicaux et une large ouverture vers des sonorités en phase avec leur époque. Parmi eux, le cas de Hammadi Hadefi, dit Cheb Tati (un surnom hérité de sa tante qu'il appelait Tatie), est exemplaire. Né en décembre 1959 à Oran, il a grandi dans le quartier M'dina Jdida (ex-Village Nègre), dont la place était réputée pour ses joutes poétiques et mélodiques entre Cheikhs au verbe subtil ou « meddah », chantres du sacré. Il y avait aussi ces petits bars d'où s'échappaient des airs andalous ou « gharbi », interprétés, sur fond de luth, de guitare ou d'accordéon par Saoud l'Oranais, Blaoui Houari ou Ahmed Saber. Tati, à l'insu de ses parents, courait, de temps en temps, ces lieux et enregistrait l'essentiel dans sa mémoire.
Ces souvenirs hanteront longtemps son esprit et l'influenceront au cours de ses premiers pas, effectués au rythme des saisons de mariages ou des passages en cabarets aux noms exotiques qui fleurissent sur la corniche oranaise. En cette fin des années 70, ses collègues qui se succédaient sur les scènes étroites avaient pour nom Khaled, Sahraoui, Fadéla ou Cheb Hindi. Plus tard, encouragé par les échos favorables qui avaient suivi la tenue du festival raï de Bobigny en 1986, il s'installe en région parisienne. Après une poignée de cassettes enregistrées dans le souk-business de Barbès, il grave enfin, en 1989 chez Blue Moon, un véritable album, « El Hammam » (Le bain maure), arrangé par Denis Bovel. Il y donne libre cours à ses arabesques vocales et à ses compositions inspirées du terroir, mélangeant héritage des aînés et modernité de bonne facture, ou introduisant reggae, pop et flamenco. Même quand il s'adonne à des reprises, il sait leur donner l'éclat du neuf, tout comme il parvient à se glisser facilement dans une culture pour lui inconnue, à l'image d'un duo commis avec un chanteur traditionnel japonais, grâce auquel il fera produire un de ses albums à Tokyo. Un autre enregistrement, en 1995 en compagnie de l'Oranais Mohamed Maghni, révélera d'autres qualités : voix plus « habitée » et mélodies encore plus soignées.
Ce nouvel album, auquel participe le groupe Arabesque, confirme la qualité première de Cheb Tati : l'authenticité des maudits. Avec sa petite moustache et ses cheveux frisottants, il passerait aisément pour un gitan versant dans le « cante jondo » (chant profond, synonyme de flamenco). Il y a, fort justement, sur bien des plages, un canevas andalou qui n'étonnera que ceux qui ignorent qu'Oran a vécu deux siècles d'occupation espagnole. Dans une ambiance, où les synthés se font discrets quand ils ne se déguisent pas en minute de silence, les guitares, énergiquement ibériques balisent le chemin pour mieux guider l'auditeur à travers des chansons croisant flamenco, chaâbi, raï ou « asri » (ancêtre du raï, lancé par Blaoui Houari et Ahmed Wahby). Le tout s'appuie sur des racines et une gouaille oranaises qui affichent plus d'un demi-siècle de création musicale au compteur. Cheb Tati fait parfois revivre l'épique en ouvrant par une flûte, puis un « mawwal » (prélude vocal), à la manière d'un grand Cheikh (« Ana Ouiack », en fin de track-list, un morceau dont il offre également une version remixée par K-Mel d'Alliance Ethnik). Quelques morceaux d'anthologie, à l'enseigne de « Ana Melite », « Besslama » ou « Derha », sont revisités façon gypsie. On dit que, des fois, le flamenco se chante avec du sang dans la bouche, tant il y a de la fureur dans les sentiments exprimés. Le raï de Cheb Tati s'en approche et, mieux, il se situe entre grâce et rage.
(dossier de presse, mars 2003)
Album : CHEB TATI & ARABESQUE - SON RECORDS - Dist.wagram
sortie le 15/03/2003



